RDC: Le report de la Conférence des Gouverneurs à Bandundu met en lumière l’échec du développement local planifié

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La nouvelle est tombée en début de soirée, comme une formalité administrative; la 13ᵉ session de la Conférence des gouverneurs, prévue du 9 au 13 décembre dans la ville de Bandundu, est reportée à une date ultérieure. Le Secrétaire permanent de la Conférence en a fait l’annonce dans un communiqué, justifiant ce report par la nécessité de finaliser les préparatifs techniques. Ce report révèle, au-delà de simples retards logistiques, l’urgence d’un véritable plan de développement provincial. 

Mais derrière cette formulation lisse se cache une réalité plus brute : Bandundu, choisie pour devenir l’épicentre du dialogue entre le pouvoir central et les provinces, n’était tout simplement pas prête. Un symbole fort d’une tendance trop répandue dans le pays : bricoler à la hâte des infrastructures provisoires, plutôt que de penser un véritable développement à long terme.

Des chantiers loin d’être livrés

Sur le terrain, les retards sont évidents. Les deux chapiteaux destinés à accueillir les assises sont toujours en construction. Le premier n’a pas encore terminé son coulage de béton, tandis que le second en est encore à l’étape d’aplanissement du terrain et de creusement des caniveaux. Quant à l’avenue Kwango, censée être bétonnée sur 12 km, elle n’a reçu aucune couche à ce jour.

Le chantier le plus sensible reste celui de l’aéroport de Bandundu. Sur les 6 400 m² de tarmac prévus, seuls 900 m² sont réalisés. L’accès difficile aux matériaux, les pluies et la mécanisation insuffisante expliquent ces retards. Pourtant, les autorités avaient promis une mise à disposition du site avant l’ouverture de la conférence.

Des visites présidentielles compromises

Le programme prévoyait également un déplacement du Chef de l’État à Kikwit. À l’ordre du jour : un meeting, l’inauguration de l’hôpital militaire Pwati, du bâtiment de l’auditorat militaire, et la visite de la sous-station du barrage hydroélectrique de Kakobola. Autant de projets censés illustrer les efforts de développement dans la province.

Mais l’annulation de ce déplacement pose une question de fond : peut-on se contenter d’effets d’annonce et de projets inachevés pour impulser le décollage des provinces ?

Bricolage institutionnel ou planification réelle ?

Le report de la Conférence souligne l’absence criante de vision à long terme pour les villes secondaires du pays. Bandundu, chef-lieu de la province du Kwilu, illustre les conséquences d’un développement improvisé. La ville, à fort potentiel agricole et énergétique, reste enclavée, faiblement équipée, et peu valorisée par les politiques publiques.

Pourquoi choisir Bandundu pour un tel événement si les infrastructures de base n’y sont pas assurées ? Ce choix relève-t-il d’une stratégie d’équilibrage territorial ou d’une simple posture politique ?

Au lieu de déplorer uniquement les retards, cette situation devrait inviter à une réflexion plus large : comment faire de ces provinces les moteurs réels de croissance ? La décentralisation ne peut être réduite à des discours ; elle doit s’accompagner d’investissements sérieux dans les infrastructures, la logistique, la formation et les services publics.

Le Kwilu, riche en manioc, en cacao, en rivières et en soleil, pourrait devenir un pôle agro-industriel. Mais pour cela, il faut un aéroport fonctionnel, des routes praticables, des zones économiques aménagées, et un véritable accompagnement des jeunes entrepreneurs locaux.

Le report de la Conférence des Gouverneurs est certes une déception logistique, mais surtout un signal d’alarme. Il est temps de cesser de bricoler. Nos provinces méritent mieux que des projets de dernière minute. Elles ont besoin de vision, de cohérence et de continuité.

C’est à ce prix seulement que des villes comme Bandundu pourront accueillir avec fierté, et non avec improvisation, les grands rendez-vous de la République.

Patrick Bintene

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