La République démocratique du Congo a franchi un nouveau cap dans la consolidation de ses finances publiques. Le Ministre des Finances, Doudou Fwamba a présidé ce mardi à Kinshasa une réunion de haut niveau du Cadre permanent de concertation et de suivi de la réforme des finances publiques. En présence d’ambassadeurs, de représentants du FMI, de la Banque mondiale, de la BAD et du PNUD, cette rencontre a permis de faire un point d’étape crucial sur l’état des réformes engagées dans le secteur public.
Cette rencontre multisectorielle a été l’occasion de passer en revue l’ensemble des chantiers en cours dans la gestion publique : mise en œuvre du budget-programme, modernisation de la fiscalité directe, introduction de la facture normalisée, et opérationnalisation du Compte Unique du Trésor (CUT).
Autant d’outils jugés indispensables pour améliorer l’efficacité des dépenses publiques, lutter contre la corruption et assainir les circuits financiers de l’État.
« Le Gouvernement, sous le leadership du Président Félix Antoine Tshisekedi, reste déterminé à poursuivre ces réformes structurelles pour consolider la stabilité macroéconomique et améliorer le climat des affaires », a affirmé le Ministre Doudou Fwamba.
L’un des éléments majeurs de cette réforme est la généralisation du budget-programme, qui vise à sortir d’une logique de moyens pour passer à une gestion publique axée sur les résultats. Ce système permet de planifier, exécuter et évaluer les politiques publiques en fonction de leur impact concret sur la population, tout en responsabilisant davantage les ministères sectoriels.
Sa mise en œuvre progressive depuis 2022, avec le soutien du FMI et de la Banque mondiale, marque un changement de paradigme dans la gestion de la dépense publique en RDC.
Autre levier central : la modernisation de la fiscalité directe, qui entend élargir l’assiette fiscale, améliorer la collecte et lutter contre l’évasion et la fraude. Des outils tels que la facture normalisée, déjà introduite dans plusieurs secteurs à Kinshasa et au Kongo Central, permettent de tracer les transactions commerciales et de sécuriser les recettes fiscales.
La réforme prévoit également une digitalisation accrue des services fiscaux, notamment via la plateforme e-Tax, afin de réduire les contacts entre contribuables et agents de l’État, un point souvent évoqué comme source de corruption.
Le Compte Unique du Trésor (CUT) figure également parmi les priorités. Ce mécanisme, dont l’objectif est de centraliser toutes les ressources publiques sur un seul compte, permet de mieux planifier la trésorerie de l’État, d’éviter les doublons et les comptes parallèles, et d’améliorer la lisibilité budgétaire.
Selon les techniciens du ministère, l’interconnexion progressive des régies financières (DGI, DGDA, DGRAD) au CUT permettra à terme une maîtrise plus fine des flux financiers de l’État et une réduction des arriérés de paiement.
En marge de cette réunion, un moment fort a marqué la journée : la signature d’un protocole d’accord instituant le Cadre permanent de concertation avec les partenaires techniques et financiers, notamment le FMI, la Banque mondiale, la Banque africaine de développement (BAD) et le PNUD.
Ce cadre vise à institutionnaliser le dialogue stratégique entre le gouvernement et ses partenaires, pour assurer une meilleure coordination des appuis techniques et financiers dans la mise en œuvre des réformes.
« Il s’agit d’un outil qui permettra d’aligner les soutiens sur les priorités nationales, d’évaluer ensemble les progrès, et de renforcer la redevabilité mutuelle », a précisé un représentant du FMI à l’issue de la réunion.
Si ces réformes peuvent sembler techniques, elles ont des retombées concrètes pour la population congolaise. En renforçant la transparence dans l’allocation des fonds publics, en réduisant les gaspillages, et en sécurisant les recettes de l’État, le gouvernement entend créer un environnement plus favorable à l’investissement privé et améliorer l’offre de services publics de base.
Pour les jeunes entrepreneurs, une fiscalité plus claire et équitable, associée à une administration modernisée, est un facteur clé pour développer leurs activités sans subir des prélèvements arbitraires.
Pour les partenaires internationaux, cette nouvelle dynamique est un signal positif : elle témoigne d’un engagement accru en faveur de la bonne gouvernance, un critère indispensable pour l’octroi d’appuis budgétaires ou de financements structurants.
Le processus engagé par le gouvernement congolais est ambitieux et salué par ses partenaires, mais il reste fragile et tributaire d’une volonté politique constante. Le succès de ces réformes dépendra de plusieurs facteurs : la capacité de l’État à sanctionner les abus, la formation des agents publics, l’adhésion des citoyens, et la pression de la société civile pour exiger des comptes.
Le Cadre permanent de concertation est désormais en place pour en assurer le suivi. Reste à savoir si cette volonté affichée de transparence et de rigueur budgétaire saura se traduire, dans les mois à venir, en gains tangibles pour les Congolais.
De Favre