RDC : Un contrat controversé de 30 USD par passager pour la gestion des services de sécurité et d’immigration 

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Le gouvernement de la République démocratique du Congo a signé, en août 2025, un contrat de partenariat public-privé (PPP) pour la mise en place d’un système intégré de gestion des services de sécurité et d’immigration. Ce contrat, structuré selon le modèle Build – Train – Maintain – Transfer (BTMT), engage un partenaire privé à concevoir, financer, installer, maintenir et transférer ce système au terme de l’accord.

Si ce projet vise à moderniser les infrastructures de sécurité aéroportuaire et de contrôle migratoire, il suscite déjà des interrogations sur sa pertinence, sa cohérence avec les systèmes déjà en place, et surtout sur la redevance de sécurité imposée aux voyageurs : 30 USD par passager, à chaque arrivée ou départ des aéroports internationaux du pays.

Selon les termes du contrat, le Partenaire Privé sera responsable de l’installation des Services CAISS (Contrôle Automatisé Intégré de la Sécurité et des Services). Le projet couvre la surveillance, la gestion des flux migratoires, et la sécurité de l’aviation civile dans des sites définis en annexe.

La rémunération du partenaire sera exclusivement assurée par les frais de garantie collectés via la redevance de 30 USD. Autrement dit, chaque passager sur un vol commercial au départ ou à l’arrivée en RDC financera ce projet, sans contribution budgétaire directe de l’État.

Ce mécanisme pose la question de l’impact sur le coût du transport aérien, dans un pays où le pouvoir d’achat est limité et où le prix des billets d’avion reste déjà parmi les plus élevés d’Afrique.

Le contrat exige que l’Autorité contractante soit informée quotidiennement du nombre de passagers et des montants prélevés par vol. Une mesure de transparence indispensable pour garantir le remboursement du coût d’investissement, mais qui soulève la nécessité d’un contrôle rigoureux des opérations financières.

L’expérience en RDC montre que de nombreux projets PPP ont souffert d’un manque de suivi, de flou contractuel ou de conflits d’intérêts. D’où l’importance cruciale de mécanismes de gouvernance renforcés pour éviter toute dérive.

Ce contrat intervient dans un contexte particulier. En février 2024, la Direction Générale de Migration (DGM) avait pourtant émis des réserves sur une proposition similaire présentée par la même  société SECURIPORT, évoquant l’efficacité des dispositifs déjà existants aux postes frontaliers.

Dans une note interne de la DGM qui circule dans les réseaux sociaux, cette dernière reconnaissait que les solutions proposées — étude, conception, entretien, formation étaient pour la plupart déjà opérationnelles. Elle estimait alors que les innovations avancées ne nécessitaient pas un nouveau contrat à impact financier, remettant en cause la nécessité d’un engagement aussi coûteux.

Cette divergence soulève une interrogation légitime : qu’est-ce qui a motivé le revirement du gouvernement entre février et août 2025 ? Quel processus décisionnel a permis de valider un contrat impliquant la collecte de centaines de millions de dollars, sans appel d’offres public ni débat parlementaire ?

Ce projet représente une opportunité d’améliorer les services de sécurité et d’immigration. Mais il doit être encadré avec rigueur, pour éviter qu’il ne se transforme en une rente durable pour un prestataire privé, au détriment des usagers et de l’État congolais.

Une redevance de trop pour les passagers ?

Dans un pays où le transport aérien est déjà onéreux, l’ajout d’une redevance de 30 USD par trajet risque de susciter la colère des voyageurs et des compagnies aériennes. Cette taxe, qui s’ajoute à d’autres frais existants, pourrait pénaliser la compétitivité des aéroports congolais, freiner la mobilité et renforcer la perception d’une fiscalité abusive sur les services essentiels.

Pour restaurer la confiance, il est impératif que les détails du contrat, les modalités de suivi, les résultats attendus et les revenus générés soient rendus publics. La gestion de la sécurité ne peut se faire au détriment de la transparence et de l’intérêt général.

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