La Banque centrale du Congo (BCC) s’apprête à lancer une campagne nationale pour valoriser la monnaie nationale, le franc congolais (CDF). Une chanson intitulée « Franc congolais, nkolo mabele », arrangée par le célèbre Souzy Kasseya, réunira plusieurs artistes congolais pour célébrer ce symbole d’identité économique.
Mais si la démarche culturelle séduit par son originalité, elle ne fait pas l’unanimité parmi les économistes. Cette campagne s’inscrit dans une stratégie de communication visant à redorer l’image du CDF, souvent marginalisé au profit du dollar américain dans les transactions quotidiennes. En s’appuyant sur la musique, vecteur de mobilisation sociale, la Banque centrale espère sensibiliser les citoyens à l’importance de la souveraineté monétaire et raviver la confiance envers la monnaie nationale.
Cependant, pour David Alexandre Nshue, économiste et enseignant dans plusieurs universités congolaises, la campagne manque de fondement économique réel.
« On ne célèbre pas ce qui n’existe pas, et on ne décrète pas la stabilité monétaire », tranche-t-il. « Tant que le franc congolais reste structurellement faible, dépendant des chocs extérieurs et largement supplanté par le dollar, ce genre de dépenses relève plus de la communication que de la solution. »
Il estime que ces campagnes, aussi bien intentionnées soient-elles, ne résolvent pas les causes profondes de l’instabilité monétaire.
L’économiste va plus loin « Ce sont des dépenses inutiles pour aucun résultat. Ce dont nous avons besoin, c’est de discipline dans la gestion des ressources publiques, de transparence budgétaire, et d’un cadre macroéconomique crédible. »
Selon lui, la confiance dans une monnaie ne se construit pas par des hymnes, mais par la solidité des fondamentaux économiques : une inflation maîtrisée, un budget équilibré, une production intérieure renforcée, et une politique monétaire cohérente.
Ce débat met en lumière le fossé entre la symbolique politique de certaines initiatives et les exigences techniques de l’économie réelle. La BCC cherche à réaffirmer le rôle du franc congolais comme levier de souveraineté, mais les critiques rappellent que sans réformes structurelles, la monnaie nationale restera fragile.
La chanson « Franc congolais, nkolo mabele » suscite déjà l’intérêt du public. Mais pour qu’elle dépasse le simple effet d’annonce, il faudra qu’elle s’accompagne de mesures concrètes : meilleure gouvernance économique, lutte contre la dollarisation, et stabilité institutionnelle.
En République démocratique du Congo, la confiance ne se décrète pas elle se mérite. Et c’est là tout l’enjeu du franc congolais.



