RDC: l’allemand Gernot Wagner serait-il dans l’incapacité de construire 10.000 km des chemins de fer à 25 milliards USD [Retro 2020]

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Le 22 octobre 2020, l’homme d’affaires allemand Gernot Wagner et le gouvernement congolais ont signé un accord pour la construction de 10.000 km des chemins de fer modernes en RDC pour 25 milliards de dollars américains. 

Le contrat a été salué par de nombreux congolais, voyant ainsi une ouverture du pays à l’extérieur, après le programme sino-congolais de 2008.  Lors de la visite officielle du président Félix Tshisekedi en Allemagne au mois de novembre 2019, cette idée avait déjà été présentée à la partie congolaise. 

Malgré l’importance de cet investissement, qui va relier toutes les 26 provinces du pays, des doutes subsistent quant à la capacité financière de l’entrepreneur à financer ces infrastructures.

Ce que cache Wagner

Selon des sources de la société, le projet devrait être financé par l’entreprise Congo Railway Development AG, société-membre de Wagner, dont le siège se trouve dans le canton Zoug en Suisse. “Les fonds propres de cette entreprise est de 185.000 euros, semblent être relativement un petit budget au regard de l’investissement attendu. La taille modeste de la société Evagor, dont le bilan n’atteint pas les 13 millions d’euros, suscite des interrogations sur sa capacité à développer ses projets congolais”. 

Au sein de son conseil d’administration ne siègent pas de spécialistes de la voie ferroviaire, révèlent les documents de la société consultés par Tsieleka. Mais on y retrouve l’entrepreneur Bruno Gerber de Leipzig, fondateur de la compagnie Wassermühle Immobilien GmbH, ainsi que Sven Asmus, Manager des Golf & Country Club Leipzig. Il n’y a que le signe d’un engagement des grandes banques ou des firmes spécialisées, derrière le projet que personne ne veut présenter.

Cependant, Wagner, à travers sa société Evagor a signé un contrat avec la Gécamines pour le projet de production d’énergie à partir du charbon de Luena dans le Haut Lomami en 2012. L’électricité qui va être produite servira à alimenter les villes de Lubumbashi, Likasi, Kolwezi, Bukama, Kamina, Fungurume et Tenke. dans sa première phase.

La Gécamines, actionnaire à 70% de CTL, lui avait commandé une étude de faisabilité de 15 millions de dollars. Mais celle-ci au dire de la Gécamines avait été incomplète et la garantie de financement du projet par une banque allemande n’a jamais été fournie. Après multiples tergiversations et rencontres sans issues, la Gecamines a sollicité une contre expertise auprès d’une entreprise Britannique. Celle-ci a démontré que l’étude faite par les allemands était incomplète et que le projet ne pouvait pas être financé, car non bancable. 

En Octobre 2019, au cours d’une rencontre avec les députés originaires de la province du Haut-Lomami, la Gécamines avait indiqué que “Evagor est tout simplement un commissionnaire et donc on ne peut pas lui confier le projet CTL. En plus cette société a changé 3 fois le montant du projet. Initialement prévu pour 660 millions de dollars pour une production de 540 Mégawatts, Evagor a revu le montant au double mais pour la moitié de la capacité de la centrale soit 270 Mégawatt. Et enfin tout récemment après avoir rencontré la nouvelle administration à la Présidence ce montant a été porté à 2,7 milliards ». Finalement la gécamines a tourné le dos à Evagor pour d’autres partenaires.

Production de l’hydrogène: une utopie ?

L’allemand a également dans son agenda congolais le projet de production de l’hydrogène. Les allemands envisagent d’importer de l’hydrogène produit à partir de l’électricité d’Inga, profitant de fonds européens pour développer cette forme d’énergie propre. En Août dernier, l’Allemand Gernot Wagner, patron de la société Evagor, était à Kinshasa pour convaincre la présidence Félix Tshisekedi de la pertinence du projet.

Il veut associer d’autres sociétés allemandes (Siemens, Linde, VN Gas et la Deutsche Bank). Il inscrit sa démarche dans le contexte de la stratégie de l’hydrogène vert présentée le 8 juillet dernier par la Commission européenne pour décarboner les secteurs les plus polluants comme la sidérurgie et les transports et conduire l’UE vers la neutralité climatique en 2050, en remplaçant les énergies fossiles.

Avec qui Wagner veut réaliser ce projet

Pour la mise en œuvre du projet des chemins de fer, Wagner a mobilisé ceux qui soutiennent cette initiative. Il s’agit de l’entreprise MAA « Mittelstandsallianz Afrika », de l’entreprise-mère allemande BVMW « Bundesverband Mittelständische Wirtschaft ». Selon la MAA, la compagnie Wagner et ses partenaires ont développé ce projet depuis 2011.

“Le premier corridor pourra s’étendre de la frontière entre l’Angola et la RDC vers Lubumbashi, ensuite elle conduit plus loin vers Sakania à la frontière avec la Zambie. Le deuxième corridor de 780 km pourra relier la capitale Kinshasa avec la région Bas-Congo comme aussi la côte ainsi que le nouveau port en eau profonde à Banana. Le troisième corridor pourra établir une liaison entre la région Kasaï, le Kongo Central et l’est du pays”, révèle le contrat.

Dans 4 à 5 ans on pourra construire les deux premiers corridors, dont chacun a une liaison de 1000 km, pour ensuite progressivement élargir la construction jusqu’à 10.000 km. 

Le gouvernement de la RDC a de sa part décidé le 16 octobre 2019 d’une procédure de concession au bénéfice des trois entreprises publiques qui gèrent les voies ferroviaires et les ports: la société commerciale des transports et des ports (SCTP), l’office nationale des transports (connue sous le nom « Onatra » et actuellement inefficace), la socièté nationale des chemins de fer du Congo (SNCC) et l’entreprise Chemins de fer des Uélé (SCF), opératrice d’ un chemin de fer à voie étroite qui n’existe encore que sur papier dans le nord-est du pays.

Valery Bakutweni

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