RDC : Entre 13,1 et 16 milliards USD, où se situe réellement la dette publique ?

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Un vif débat agite ces derniers jours la République démocratique du Congo : quel est le montant exact de la dette publique ? Tandis que le Vice-Premier ministre en charge du Budget évoquait récemment un chiffre de 16 milliards USD selon plusieurs médias, la Direction générale de la dette publique (DGDP) a publié ce matin une mise au point. Elle établit, au 30 juin 2025, le stock de la dette à 13,1 milliards USD. Tsieleka décrypte les chiffres et les enjeux.

Deux chiffres, deux périmètres

Selon la DGDP, la dette publique de la RDC s’élevait à 13,1 milliards USD à la fin juin 2025, répartie entre 9,0 milliards de dette extérieure et 4,1 milliards de dette intérieure. En y ajoutant les créances de la Banque centrale du Congo (BCC) sur le Trésor public évaluées à 1,4 milliard USD le total grimpe à 14,5 milliards USD.

De son côté, le chiffre de 16 milliards USD avancé par le VPM du Budget reflète probablement un périmètre élargi, incluant des arriérés de paiement, des engagements conditionnels ou des dettes garanties. Il s’agirait donc d’une estimation politique, moins rigoureuse méthodologiquement que les données arrêtées par la DGDP.

Un stock évolutif depuis juin 2025

Les chiffres officiels s’arrêtent au 30 juin 2025. Mais la dette n’est pas figée. Depuis cette date, plusieurs opérations sont venues alourdir le stock.

Début juillet 2025, le FMI a débloqué 190,4 millions de DTS, soit environ 262 millions USD, au titre de la Facilité élargie de crédit (FEC), à l’issue de la première revue du programme. Sur le plan domestique, de nouvelles émissions de Bons et Obligations du Trésor au troisième trimestre 2025 ont augmenté la dette intérieure.

À cela s’ajoute l’effet taux de change : une partie de la dette étant libellée en devises, la dépréciation du franc congolais peut gonfler le stock en dollars. Ces facteurs justifient que le chiffre réel puisse désormais dépasser les 14,5 milliards USD et se rapprocher des 15 à 16 milliards USD évoqués dans le débat public.

Pourquoi la dette extérieure progresse-t-elle ?

La DGDP explique que l’augmentation de la dette extérieure résulte principalement des programmes de réformes conclus avec les partenaires multilatéraux, notamment la Facilité de crédit rapide (FCR) ; la Facilité élargie de crédit (FEC) ; la Facilité pour la résilience et la durabilité (FRD).

Ces instruments sont conçus pour soutenir l’investissement, renforcer la résilience macroéconomique et financer les priorités sociales. Autrement dit, l’accès accru aux financements extérieurs est le reflet d’un meilleur positionnement du pays sur le plan international, une avancée à relativiser si elle n’est pas accompagnée d’une gestion rigoureuse.

Le vrai enjeu : la soutenabilité

Plus que le montant brut, c’est la soutenabilité de la dette qui importe. Trois indicateurs clés permettent d’évaluer cela :

Dette/PIB : mesure la capacité du pays à absorber le stock de dette ; Service de la dette/recettes publiques : indique si le remboursement ne grève pas les dépenses sociales ; Structure de la dette (intérieure vs extérieure) : essentielle pour limiter les risques de change et de refinancement.

Tant que l’économie progresse, que les recettes publiques sont mieux mobilisées, et que la transparence s’améliore dans l’usage des fonds empruntés, la dette reste soutenable. Mais sans discipline budgétaire ni bonne gouvernance, l’endettement peut vite devenir un piège.

Un débat à recentrer sur la qualité des emprunts

En résumé, la dette publique de la RDC était officiellement entre 13,1 et 14,5 milliards USD à fin juin 2025. Depuis, les nouveaux engagements (FMI, émissions de titres) justifient une hausse vers 15 milliards USD. La divergence autour des 16 milliards USD ne résulte pas d’une manipulation, mais bien des écarts de périmètre et de temporalité entre les sources.

Il est donc temps de déplacer le débat : du chiffre nominal à la qualité des financements. Ce sont la gestion de la trésorerie publique, la rigueur dans l’exécution budgétaire et la capacité du pays à transformer les emprunts en croissance inclusive et durable qui doivent être au cœur des préoccupations.

Rédaction

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